Salle 8, EHESS - 105 bd Raspail 75 006 Paris, 9h - 13h.
Le 13 septembre 2007, l’Assemblée générale des Nations unies adoptait la Déclaration sur les droits des peuples autochtones (DDPA), un document de haute valeur symbolique et morale destiné à réparer les situations de marginalisation et de discrimination dans lesquelles ont été plongées les sociétés et les personnes autochtones du fait de la colonisation et de la construction de l’État moderne. Cette déclaration de droit international a une portée universelle, elle étend le domaine des droits humains et reconnaît des droits collectifs à côté des droits individuels.
Mais elle ne s’applique directement dans aucun des États de la planète et l’on observe des situations très variées, marquées par l’histoire et par l’actualité, de reconnaissance, de déni, de violation des droits fondamentaux ou environnementaux. Réalisé à partir d’une étude menée sur plusieurs années aux Nations unies et dans une dizaine d’États sur quatre continents, ce livre explique ce que sont les droits consacrés par la DDPA et les interprétations auxquelles ils donnent lieu au sein des systèmes régionaux de droits de l’homme. Il situe les contextes politiques et juridiques de nombreux peuples autochtones, et ouvre la réflexion sur les conditions de mise en œuvre de normes protectrices et ambitieuses. Si le cadre international, la méthode comparative, les collaborations interdisciplinaires conduisent à saisir le sujet sous les différentes facettes qui démontrent l’étendue de sa complexité, l’analyse proposée permet, elle, d’envisager les moyens d’avancer en termes de respect des différences culturelles et d’inclusion sociale ou économique. Au fil de trois parties, le lecteur pourra prendre connaissance du cadre juridique international puis se plonger dans les dynamiques politiques et les situations des peuples autochtones, en Argentine, en Australie, en Bolivie, au Botswana, au Chili, en Guyane française, en Inde, au Mexique, en Nouvelle- Calédonie et en Namibie. Afin de comprendre au mieux comment les droits des peuples autochtones sont visés ou négligés dans les dispositifs étatiques, l’étude propose une lecture qui repose sur trois catégories de droits : la première est relative à l’espace politique de la gouvernance, de la participation et de la citoyenneté, la deuxième au rapport à la terre, aux territoires et aux ressources naturelles, la troisième aux droits culturels, économiques et sociaux.
Irène Bellier, Leslie Cloud et Laurent Lacroix présenteront cet ouvrage qu’ils ont co-écrit en s’appuyant sur les collaborations actives des membres de l’équipe SOGIP, Rowena Dickins Morrison, Jennifer Hays, Verónica González, Stéphanie Guyon, Martin Préaud, Raphaël Rousseleau et Benoît Trépied.
http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&isbn=9782343119083
http://www.sogip.ehess.fr/spip.php?article646
À la suite des travaux réalisés par l’équipe SOGIP (ERC 249 236, LAIOS) qui, pendant 5 ans a examiné les perspectives ouvertes par l’adoption, en 2007, de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones (DDPA), nous poursuivons la réflexion sur les articulations entre « questions autochtones » et « processus globaux ». Nous nous intéressons aux acteurs politiques autochtones, à leurs prises de position dans différents scénarios de la gouvernance mondiale, ainsi qu’aux situations localisées révélatrices de l’impact des méga-agents du changement (sociétés transnationales, extractives). Les années précédentes, nous avons exploré de manière comparative, et à partir d’études de cas contextualisées, les questions de reconnaissance légale, de développement et de territorialité, d’éducation, de citoyenneté et de participation politique, parce qu’elles posent les sujets autochtones dans leurs relations à l’État et aux institutions internationales. Nous avons abordé certains enjeux d’importance en matière de droits des peuples autochtones pour comprendre leurs demandes et parfois leurs positions de négociation, par exemple en matière de patrimonialisation et de propriété intellectuelle, de genre, de justice, de changement climatique et de développement durable. Grâce à une approche pluridisciplinaire, les analyses montrent que les questions de droits de peuples autochtones ne portent pas seulement sur des enjeux spécifiques : elles définissent un horizon de réflexion sur les conditions de possibilités de se gouverner soi-même et sur les frontières de l’autonomie.
Irène Bellier, Directrice de Recherche au CNRS, IIAC-LAIOS, Verónica González González, CONACYT/IIAC-LAIOS
Ce séminaire s’appuie sur une recherche financée, depuis 2010, par le Conseil européen de la recherche, dans le cadre du 7e programme cadre (FP7/2007-2013 Grant Agreement ERC n° 249236).
2e jeudi du mois de 9 h à 13 h (salle du Conseil A, R-1, bât. Le France, 190 av de France 75013 Paris), du 10 novembre 2016 au 11 mai 2017. Ouvert à tous.
Les séances des 8 décembre 2016 et 9 mars 2017 se dérouleront en salle 015 (même adresse). Séance supplémentaire le 30 mars 2017 (salle du conseil A, bât. Le France).
SEANCES PPRÉCÉDENTES
La première séance de cette année a été organisée autour de la présentation du livre publié au printemps 2016 sous la direction de Simone Dreyfus-Gamelon et Patrick Kulesza : Les indiens d’Amazonie face au développement prédateur. Nouveaux projets d’exploitation et menaces sur les droits humains (Paris : L’Harmattan).
Qu’en est-il des Indiens d’Amazonie aujourd’hui face à de nouvelles entreprises de « développement »? D’un côté, ils font partie de pays qui ont pour la plupart adopté des constitutions reconnaissant leur existence, leurs différences culturelles et leurs droits, ce qui induit des tensions spécifiques sur la nature de l’État et ses modes de fonctionnement. De l’autre, l’Amazonie reste perçue, dans le discours dominant, comme une terre de conquête, certes riche de sa diversité bio-culturelle mais aussi promesse de gains agro-industriels et miniers.
Plusieurs auteurs de l’ouvrage ont présenté leurs analyses de la situation dans 8 des 9 pays amazoniens.
Catherine Alès, CNRS, CéSor : Plus loin que plus loin. Droits autochtones au Venezuela, mineurs illégaux et guerilleros en Amazonie vénézuélienne
Irène Bellier, CNRS, IIAC/LAIOS : Infrastructures routières, projets de développement externe et consultation au Pérou
Gérard Collomb, CNRS, IIAC/LAIOS : Amérindiens de Guyane: un état des lieux
Sofía Cevallos, doctorante EHESS, IIAC/LAIOS : L’initiative Yasuni ITT : redéfinition du paradigme de développement ou exclusion des droits des peuples autochtones en Équateur ?
Patrick Kulezsa, GITPA: Quand le développement et l’essor économique étranglent les droits des autochtones
Laurent Lacroix, IIAC/LAIOS: L’État plurinational de Bolivie : chronique d’un projet politique sans lendemain pour les peuples autochtones des Basses Terres ?
Plus loin que plus loin. Droits autochtones au Venezuela, mineurs illégaux et guerilleros en Amazonie vénézuélienne
Catherine Alès
La Constitution du Venezuela de 1999 a octroyé des droits aux peuples autochtones habitant ce pays. On retracera l’histoire des avancées juridiques acquises par les autochtones, tout en montrant la faible application concrète de leurs droits durant les dix-sept dernières années (1999-2016). Seront également présentées les récentes mobilisations des communautés et organisations amérindiennes face à cette situation et à l’invasion de leurs territoires par des mineurs illégaux ainsi que par des groupes armés irréguliers en provenance de Colombie et, en particulier, face au dernier projet gouvernemental de l’« Arc Minier de l’Orénoque ».
Infrastructures routières, projets de développement externe et consultation au Pérou
Irène Bellier
À partir du chapitre rédigé par Françoise Morin qui met en relief l’impact de l’Initiative pour l’Intégration de l’Infrastructure Régionale Sud-Américaine, financée par la Banque interaméricaine de développement, en termes du nombre de projets routiers et ferroviaires ainsi que des modalités de leur mise en place, l’intervention présentera les réactions des organisations autochtones transnationales et locales à ces projets de « développement pour le marché », leurs effets sur les populations locales et les indiens isolés.
Amérindiens de Guyane: un état des lieux
Gérard Collomb
La présentation portera sur la situation des populations autochtones dans les trois Guyanes, dans des contextes de développement particuliers à chacun de ces pays. Elle s’interrogera aussi sur la manière dont, pour faire face aux difficultés qu’ils rencontrent, les Amérindiens ont entrepris d’investir, selon des modalités diverses dans les trois Guyanes, les espaces institutionnels et le jeu poitique qu’ont mis en place les Etats.
L’initiative Yasuni ITT : redéfinition du paradigme de développement ou exclusion des droits des peuples autochtones en Équateur ?
Sofía Cevallos
En Equateur, le gouvernement a décidé en 2013 de mettre fin à l’Initiative pour la non-exploitation pétrolière des réserves ITT, situés dans le Parc amazonien Yasuni. Lieu d’habitation des peuples autochtones Kichwa, Huaorani, et des peuples isolés Tagaeri-Taromenane, ce territoire est affecté par les effets de l’expansion de la frontière pétrolière depuis les années 30. La décision d’exploiter le Parc Yasuni a été prise au milieu d’un contexte politique paradoxal. D’une part, la Constitution équatorienne reconnaît plusieurs droits des peuples autochtones et les droits de la nature ; d’autre part, le gouvernement vise à multiplier les projets extractivistes en territoires autochtones et paysans. Cette intervention soulignera quelques implications de l’imposition de nouvelles frontières territoriales permettant faire place à l’exploitation pétrolière, qui se trouvent en contradiction avec l’autonomie et l’auto-détermination des peuples autochtones du Yasuni, ainsi qu’avec leurs formes de vie et d’organisation.
Quand le développement et l’essor économique étranglent les droits des autochtones
Patrick Kulezsa
À partir des 3 chapitres rédigées par Artionka Capiberibe, Oiara Bonilla, José Pimenta, Christian Caubet, Maria Lucia Navarro et Lins Brzezinski, l’intervention présentera les menaces actuelles sur les droits des peuples autochtones de l’Amazonie.
L’État plurinational de Bolivie : chronique d’un projet politique sans lendemain pour les peuples autochtones des Basses Terres ?
Laurent Lacroix
La Bolivie d’Evo Morales s’affiche comme un pays pionnier en matière de reconnaissance des droits des peuples autochtones. Les bases d’un État dit plurinational sont posées au travers d’un vaste dispositif politique, institutionnel et législatif, à la fois exceptionnel et novateur. Malgré cette situation de prime abord très favorable aux peuples autochtones, ceux-ci ne cessent pourtant de dénoncer la précarité persistante de leurs droits. En particulier dans les Basses Terres où la quasi-totalité des territoires autochtones sont concernés par de nouveaux plans d’extraction des ressources naturelles ou des méga-projets d’aménagement. À l’heure d’instaurer l’État plurinational tel que le préconise la Constitution, les conflits socio-environnementaux se sont multipliés dans ces territoires. La situation interroge le respect effectif des droits reconnus aux peuples autochtones mais aussi la place réservée à ces derniers dans les plans économiques et les projets d’aménagement territorial du gouvernement d’Evo Morales dont la rhétorique indigéniste tend à disparaître au bénéfice d’un argumentaire autour du « grand saut industriel » engagé depuis 2009 et basé sur une exploitation intensive des ressources naturelles et leur exportation. Plus largement, il s’agit de s’interroger sur le devenir de l’État plurinational en cours d’édification.
La deuxième séance du séminaire cette année sera consacrée à un sujet qui se trouve au cœur des préoccupations et des revendications autochtones : le territoire. Cet élément, qui a souvent été signalé comme le problème fondamental des peuples autochtones de toutes les régions du monde, constitue en effet un objet central pour la survie de ces collectivités ainsi que pour la mise en place de leurs projets politiques.
Souvent confrontés aux imaginaires territoriaux conçus depuis les espaces de pouvoir, les peuples autochtones se servent de nouveaux moyens pour défendre, revendiquer et donner de la signification à leurs spatialités propres. Cette séance présentera des études de cas qui montrent comment les peuples autochtones produisent des instruments pour résister aux projets spatiaux qui ne correspondent pas à leurs attentes. Trois interventions permettront de porter un regard critique sur les enjeux technologiques, politiques et épistémiques impliqués dans la production de cartographies culturelles alternatives. Nous explorerons également les dilemmes auxquels se heurte la mobilisation politique autour des menaces environnementales pesant sur les territoires autochtones.
Les échanges de cette riche séance éclaireront la complexité des dynamiques qui se superposent lorsqu’on cherche de consolider les « territoires de la différence ».
Intervenants :
Fabrice Dubertret, doctorant en géographie, IHEAL, Université Paris Sorbonne Nouvelle
Irène Hirt, Chercheure CNRS, UMR 5319 Passages, Université de Bordeaux
Céline Planchou, maîtresse de conférences, Université Paris 13
Rendre explicite une présence invisible : vers un atlas mondial des territoires autochtones
Fabrice Dubertret
Au cours des dernières décennies, la reconnaissance progressive des droits territoriaux autochtones et la démocratisation des systèmes d’information géographique ont induit un renouveau dans les pratiques cartographiques autochtones. Généralement inscrites dans un processus revendicatif de reconnaissance de leurs droits, ces contre-cartographies décrivent avec précision les territoires autochtones, et s’opposent aux représentations gouvernementales occultant souvent leur présence.
Dans ce contexte, cette présentation discutera les modalités de production de telles cartes, l’opportunité de leur agrégation au sein d’une plateforme géographique globale, ainsi que les contributions d’un tel outil à la question territoriale des peuples autochtones, tant d’un point de vue scientifique que politique.
La carte, l’histoire et la lutte des peuples autochtones pour leurs droits au territoire
Irène Hirt
La mise en cartes et la mise en histoires du territoire constituent deux champs symboliques stratégiques investis par les peuples autochtones pour défendre ou maintenir des droits à l’intérieur des Etats et vis-à-vis d’acteurs tiers, et pour affirmer des imaginaires et des représentations territoriales propres. Ces processus de réappropriation du territoire seront analysés dans une perspective comparative à l’échelle des Amériques, en se fondant principalement sur des exemples situés au Chili, en Bolivie et au Canada, tirés de l’expérience de recherche de l’intervenante.
L’accent sera mis sur les enjeux culturels, épistémologiques et politiques de l’information géographique et des narrations historiques produites par les peuples autochtones, y compris leurs implications pour les chercheur(e)s travaillant avec des organisations et des communautés autochtones. Pour conclure, sera abordé le caractère heuristique de la notion de justice spatiale pour appréhender les luttes autochtones pour le territoire et les droits politiques.
#NoDAPL : les enjeux territoriaux de la lutte contre le projet d’oléoduc sur la réserve de Standing Rock
Céline Planchou
Depuis avril dernier, les Lakotas de la réserve de Standing Rock mènent la lutte contre le projet de construction du Dakota Access Pipeline, lequel doit acheminer du pétrole jusque dans l’Illinois en traversant le fleuve Missouri. Craignant que l’oléoduc contamine leur principale source en eau potable, les Lakotas ont établi un campement dans le Dakota du Nord vers lequel des milliers de personnes issues de centaines de nations autochtones ont convergé. Les enjeux environnementaux ne sont qu’un aspect de la lutte. Si la zone de construction se situe aujourd’hui à côté de la réserve, elle s’étend toutefois sur un territoire qui faisait à l’origine partie de la Grande Réserve Sioux et sur lequel les Lakotas détiennent des droits spécifiques. Cette présentation abordera ainsi les différents enjeux territoriaux de la lutte entamée par les Lakotas de Standing Rock.
Les Nations unies représentent l’arène politique où les discussions et les avancées concernant les peuples autochtones ont été les plus abouties. La collaboration de cette organisation avec le mouvement autochtone transnational a été indispensable pour induire, depuis cinquante ans, des effets de reconnaissance des droits de ces collectifs aux quatre coins du monde. Les outils élaborés à son sein ont eu des effets indiscutables pour la gouvernance des « affaires autochtones » en ouvrant la voie d’une activité publique tournée vers les peuples autochtones et en facilitant différentes formes de subjectivation politique des acteurs impliqués. Les mouvements autochtones de nombreux pays au monde ont développé des actions inspirées des discussions et des décisions prises à l’ONU.
Si le travail des Nations unies est généralement considéré dans le champ des peuples autochtones comme établissant des normes qu’il faudrait satisfaire en général, le mouvement autochtone, des universitaires et différents acteurs impliqués dans les processus internationaux continuent de pousser des revendications précises, relatives notamment à la participation aux affaires qui les concernent. La Déclaration sur les droits des peuples autochtones demeurant à ce jour le seul instrument juridique des Nations unies qui a impliqué directement les acteurs concernés dans les processus de négociation et pour le suivi de sa mise en œuvre, un important travail reste à faire pour inclure dans tous les processus internationaux ces collectifs dorénavant dotés du droit à disposer d’eux-mêmes.
L’objectif de cette séance sera d’approcher de façon critique le travail de ces organisations, de ces lieux apparemment neutres qui, placés au plus « haut » de la gouvernance multiscalaire, sont capables de produire des consensus sur des normes qui auront d’importantes conséquences sur les réalités de millions de personnes.
Irène Bellier, directrice de recherches au CNRS, anthropologue (IIAC/LAIOS-EHESS)
Claire Charters, Professeure de droit international, Auckland University, conseillère du président de l’Assemblée générale des Nations unies pour le renforcement de la participation des peuples autochtones dans les Nations unies
Veronica Gonzalez Gonzalez, sociologue (CONACYT/LAIOS)
Alexandra Xanthaki, professeure en droit (Brunel University, Londres)
Enhancing Indigenous peoples’ participation at the UN: Opening the doors
Claire Charters
The General Assembly is currently considering enhancing Indigenous peoples’ participation at the UN. This signals the first time that the General Assembly is considering opening its doors to non-state actors beyond inter-governmental and other international organisations. It reflects the unique quality of Indigenous peoples as peoples and their difference from civil society generally. Claire will introduce the background to this novel development at the UN as well as outline the various positions being taken by states and Indigenous peoples.
L’Assemblée générale des Nations unies et la demande de participation des peuples autochtones : vers la construction d’une représentation politique subalterne dans la scène multilatérale ?
Veronica Gonzalez Gonzalez
Le mouvement transnational des peuples autochtones mène aujourd’hui une action auprès de l’Assemblée générale de l’ONU pour discuter des « moyens de permettre la participation des représentants des peuples autochtones et de leurs institutions aux réunions des organes compétents de l’Organisation des Nations Unies portant sur des questions qui les concernent » (Résolution 69/2 de l’Assemblée générale des Nations unies – AGNU). Il s’agit de la négociation la plus récente que ce mouvement a entreprise afin d’obtenir une place à la table du plus grand système multilatéral. Inspirée des problématiques soulevées par les études subalternes à propos de la représentation politique, la communication propose une réflexion sur les évolutions de la question aux Nations unies et sur les obstacles rencontrés pour définir des modalités de représentation dans ce que le mouvement autochtone appelle « la plus grande bureaucratie au monde ». À travers un parcours qui montrera comment les conditions administratives ont façonné la manière dont cette demande s’est exprimée et les réponses qui lui ont été apportées, cette intervention éclairera les tensions existant entre des contraintes procédurales du champ onusien et le progrès des demandes politiques qui sont censées compter sur le soutien de l’AGNU.
« La participation des peuples autochtones aux affaires qui les concernent » : un enjeu dans les négociations internationales
Irène Bellier
Observatrice depuis une quinzaine d’années de la participation des organisations et représentants autochtones aux affaires qui les concernent sur la scène onusienne, Irène Bellier présentera trois scénarii distincts de participation politique : le premier se joue dans l’espace matriciel onusien qui, au cœur du dispositif des droits humains, a littéralement porté la réflexion sur les questions autochtones et les normes permettant de remédier à la marginalisation de ces groupes sociaux ; le second met en jeu les États et la société civile globale et agence la place des collectifs autochtones dans la gouvernance globale à travers deux types d’affaires planétaires que sont les objectifs du développement durable et la lutte contre le changement climatique ; le troisième jette une lumière clinique sur les enjeux de pouvoir qui traversent l’Assemblée générale des Nations unies. Ces trois scénarii ne se présentent pas comme des alternatives mais dans les espaces qu’ils définissent respectivement permettent de penser les avancées et les limites de la participation politique des organisations, peuples et représentants autochtones, aux affaires qui les concernent et aux échelles qui les impliquent. La communication ouvrira ainsi la voie à une réflexion sur les questions de distance, anthropologique et politique.
Indigenous Rights in the United Nations: recent developments, current challenges
Alexandra Xanthaki
The adoption of the UN Declaration on the Rights of Indigenous Peoples (UNDRIP) in 2007 was hailed as a big success of the United Nations. After the initial enthousiastic reception of the news died down, scholars working in this field have been reflecting on the content of the Declaration and its implementation. The contribution of the United Nations is crucial for both of these challenges. The lecture will discuss how United Nations bodies have tried to push forward the content of the Declaration. It will look at the role of the treaty bodies in clarifying indigenous rights as well as the missed opportunities to push states to implement the standards. It will discuss the different and evolving roles of the Expert Mechanism on the Rights of Indigenous Peoples, the UN Special Rapporteur on Indigenous Issues and the Permanent Forum on Indigenous Issues and will evaluate their work. At a more general level, the lecture will argue that the fragmentation among the UN different ‘systems’, including the human rights structure, UNESCO, WIPO and the environmental regime, are preventing a coherent approach towards indigenous rights, but the cross-fertilisation of principles, norms and standards between the universal level and the regional level have had a very positive impact on indigenous rights.
Au carrefour entre les processus de formation de la mémoire et les pratiques du quotidien, entre expression artistique et reproduction du sacré, entre mise en valeur de la culture par les acteurs externes aux communautés et production d’un patrimoine populaire capable de créer de la cohésion à l’intérieur d’un groupe, les objets autochtones se trouvant dans les musées incarnent des enjeux fondamentaux qui seront mis en lumière par les présentations que nous écouterons à l’occasion de cette séance.
Ayant circulé dans des réseaux dominés par une géopolitique dictée par les sciences, par les structures économiques et par les grandes collections d’art, ces objets ont subi un double effet d’éloignement par rapport à leur milieu de création: à la fois physique, car ils se trouvent souvent à des milliers de kilomètres de distance, et symbolique, les groupes concernés n’étant la plupart du temps pas associés à l’élaboration des expositions ou à la conception des musées qui les mettent en scène. Des entreprises de récupération de tels objets ont vu le jour depuis plusieurs décennies, souvent sans avoir les résultats souhaités par les peuples autochtones concernés. Aujourd’hui, les demandes de restitution semblent prendre un nouvel élan grâce aux développements politiques favorables aux peuples autochtones et aux évolutions des pratiques dans le champ de l’art et du culturel. Ces changements mettent en question la conception des expressions artistiques, tout en ménageant une place pour que les artistes autochtones puissent prendre part à la présentation de leur art et de leur patrimoine.
Les trois études de cas qui seront présentées dans cette séance permettront d’approfondir les problématiques et les questions concrètes impliquées dans la décolonisation de la circulation artistique et des musées.
Renato ATHIAS, Professeur d’anthropologie à l’Université de Pernambouc, directeur de NEPE - centre d’analyses des relations inter-ethniques
Sébastien MINCHIN, Directeur Muséum d’histoire naturelle de Rouen, Réunion des Musées Métropolitains
Damiana OTOIU, Maîtresse de conférences en anthropologie politique à la Faculté de Sciences Politiques de l’Université de Bucarest et coordinatrice du projet de recherche Museums and Controversial Collections
Les Amérindiens, la patrimonialisation des objets et les stratégies de renforcement identitaire dans l’actualité brésilienne
Renato Athias
La communication traitera de la notion de patrimonialisation pour un ensemble d’objets ethnographiques qui ont été recueillis chez les Amérindiens du Nord-Ouest Amazonien. Se trouvant aujourd’hui en Europe, ils font toujours partie de la tradition et de la culture vivante des sociétés concernées. L’analyse de ces situations met l’accent sur un enjeu mémoriel et identitaire qui compte dans la relation des peuples autochtones avec l’État. Les objets et le patrimoine culturel constituent en effet le support privilégié de la construction des mémoires collectives, aptes à renforcer des affirmations identitaires dans un contexte de relations interethniques. Nous nous interrogerons sur la place de ce dispositif dans la gouvernance actuelle des questions autochtones au Brésil.
Le muséum durable : une éthique de responsabilité vis à vis des peuples autochtones
Sébastien Minchin
En engageant la démarche de restitution d’une tête maorie à la Nouvelle-Zélande, le Muséum de Rouen a déclenché une véritable polémique, nécessaire pour engager de vraies réflexions sur le statut juridique, la restitution, la conservation et l’inaliénabilité des restes humains. Elle a aussi mis en exergue la question de nos relations avec les peuples dits autochtones et la façon dont nous considérons leurs revendications. Enfin, elle a permis de redonner au muséum de Rouen le rôle d’acteur dans notre société.
« Il semble que la biologie redevienne le facteur utilisé pour identifier qui est qui… ». Les musées sud-africains et les collections d’anthropologie physique à l’ère génomique
Damiana Otoiu
Depuis la fin du régime d’apartheid, les collections d’anthropologie physique des populations San et Khoekhoe sont au cœur d’une série de demandes de restitution. Il s’agit tant de demandes internationales, formulées par les représentants de l’Etat sud-africain à l’égard des musées européens, que des demandes nationales, formulées par des représentants des populations autochtones à l’égard des laboratoires sud-africains de paléoanthropologie et d’anatomie.
A partir du cas de la dé-muséification de certains restes humains gardés dans des musées et laboratoires français et sud-africains, je me propose d’analyser la (re)construction des normes et politiques muséales de deux perspectives interconnectées : politique et épistémologique. Je m’intéresse tout particulièrement à la place qu’occupe la génomique dans les débats scientifiques et publics autour des collections d’anthropologie physique et à l’usage qu’on en fait pour répondre à des questions qui semblent insolubles et qui deviennent de plus en plus politisées. Par exemple, quels groupes autochtones pourraient être considérés comme des « communautés descendantes » et auraient donc le droit de réclamer le retour des restes humains et de décider l’avenir des restes ?
Anna SCHMIT, docteure en anthropologie sociale, jeune chercheure associée au IIAC/LAIOS
Felipe GÓMEZ ISA , professeur de droit public international à l’Institut des droits de l’homme Pedro Arruspe, Université Deusto, Bilbao, Pays basque, Espagne
Leandro VARISON, enseignant-chercheur au Laboratoire d’anthropologie juridique de Paris/Université Paris 1
Éclairage anthropologique du « déplacement forcé » des peuples autochtones à partir d’un terrain guajiro (Colombie)
Anna Schmit ( IIAC/LAIOS)
La communication a pour but d’éclairer différentes situations de déplacements forcés, à partir d’une ethnographie basée sur des données récoltées lors d’un terrain long (2011-2015) mené auprès de militant.e.s d’une association locale de victimes wayúu. Elle mettra en exergue les mécanismes qui ont conduit les militant.e.s au déplacement et à l’auto-identification à la catégorie de « victime », car ils sont significatifs d’un changement dans les dynamiques relationnelles de ce peuple avec l’extérieur (étranger, colombien, représentant institutionnel). En effet, guerriers et fins négociateurs, ayant su maintenir, de la Conquête au 20e siècle, une forte autonomie face à un État émergent, les Wayúu, Indios goajiros, peuplant la péninsule de La Guajira, sont, aujourd’hui, perçus et se perçoivent « victimes », « déplacé.e.s » et « vulnérables ». Plus de quatre mille enfants wayúu seraient morts, depuis les années 2000, de déshydratation et de malnutrition dans cette région aride qui a été, à l’aune du 21e siècle, le théâtre de grands bouleversements affaiblissant l’auto-détermination wayúu. Deux facteurs, l’emboitement de conflits interfamiliaux aux logiques nationales du conflit armé et la concrétisation de projets miniers de grande ampleur, ont brisé l’ « économie morale » prévalant dans la région et ce faisant, ont obligé la population locale à recourir à de nouvelles logiques de perception, d’identification et d’action politique les menant à se déplacer et à se constituer « victimes » face à l’État colombien. En examinant le cas concrets des déplacements wayúu, cette communication propose d’explorer les correspondances, ou au contraire les discordances, entre la réalité du déplacement, la production normative visant à protéger les personnes des déplacements et leurs effets sur des destins individuels et collectifs.
Forced displacement of indigenous peoples in Colombia
Felipe Gómez Isa (Université Deusto)
The creation of more than 3 million of internally displaced people (IDPs) and the subsequent territorial expropriation in the context of the internal armed conflict in Colombia do constitute both a humanitarian and a human rights tragedy. Indigenous peoples and afro-descendant have been especially affected by forced displacement and loss of their ancestral territories. Some of them are in a situation very close to extinction. International and domestic legal standards have progressively developed the rights of victims to truth, justice, reparation and guarantees of non-repetition. Restitutive justice, a human rights approach, and a differential attention are essential ingredients for a consistent public policy to deal adequately with IDPs, especially those of an indigenous origin, given their special relationship with land and territory. The current peace process can be considered as a window of opportunity for the protection of the rights of indigenous IDPs.
La Déclaration américaine des droits des peuples autochtones : élaboration et perspectives d’un instrument controversé
Leandro Varison (LAJP, Paris 1)
Si la Cour interaméricaine des droits de l’homme est l’un des mécanismes les plus progressistes et innovants en matière de protection des droits des peuples autochtones, l’Organisation des États américains, en revanche, ne s’était jamais dotée d’un traité international concernant spécifiquement ces droits. En juin dernier, après 17 ans de délibération intergouvernementale, l’OEA a finalement adopté la Déclaration américaine des droits des peuples autochtones.
Issu d’un parcours agité, pendant lequel les représentants autochtones ont du se battre contre les délégations de plusieurs États, ce nouvel instrument a reçu un accueil mitigé de la part de ses destinataires. Certaines organisations autochtones ont célébré l’adoption de la Déclaration tandis que d’autres refusent d’accorder une quelconque légitimité à ce texte, considéré conservateur en comparaison avec d’autres instruments internationaux, notamment son équivalent onusien.
En dépit des critiques dont il est l’objet, nous pouvons imaginer les perspectives de mobilisation des droits prévus dans la nouvelle Déclaration américaine, ainsi que son appropriation par les peuples autochtones du continent et l’influence qu’il exercera sur les jurisprudences nationales et régionales.
Cette séance sera l’occasion de présenter les analyses et les réflexions développées dans trois ouvrages consacrés à l’éducation autochtone. Fruit de recherches collectives et participatives, les livres présentés essaient d’établir un pont entre le champ de l’éducation et le besoin qu’ont les autochtones de déterminer leurs propres stratégies de subsistance et leurs voies de développement.
La discussion de ces livres nous donnera des éléments pour comprendre l’éducation dans un sens général, à savoir comme transfert de connaissances entre les générations en vue de préparer la génération suivante à vivre dans une communauté particulière et dans le monde, aujourd’hui globalisé. Nous nous pencherons également sur la complexité de la notion d’éducation, tant pour identifier ce que veulent les personnes que pour dessiner le type d’approche qui permettrait d’améliorer la situation éducative des peuples autochtones.
Finalement, on approchera l’éducation en tant que droit. Nous mettrons en question la conception du droit à l’éducation autochtone et la problématique des systèmes propres d’éducation. Il semble urgent de reconnaître la diversité des approches éducatives que proposent les peuples autochtones comme des modèles viables et valides dont on peut tous apprendre.
Irène BELLIER, Directrice de recherches en anthropologie (CNRS, IIAC/LAIOS)
Jennifer HAYS, Professeure associée en anthropologie, UIT Université arctique de Norvège
Emmanuelle RICAUD, Doctorante IIAC/LAIOS
Marie SALAÜN, Professeure d’anthropologie, Université René Descartes Paris
Bruno BARONNET, Professeur/chercheur en sociologie, Instituto de Investigaciones en Educación, Universidad Veracruzana (Xalapa, Mexique)
Quelle éducation pour les peuples autochtones ?
Irène Bellier, CNRS, IIAC/LAIOS-SOGIP
Irène Bellier présentera le livre qu’elle a coordonné avec Jennifer Hays intitulé Quelle éducation pour les peuples autochtones », Paris : L’Harmattan, 2017.
Bien que de nombreux mécanismes internationaux soient censés garantir un droit à l’éducation pour chacun, cet ouvrage montre que les peuples autochtones sont partout en lutte pour trouver une place et une voix dans les systèmes éducatifs qui sont dessinés par les institutions dominantes pour les populations majoritaires. Certes l’éducation formelle peut donner accès aux compétences requises pour faire partie d’une société, travailler et
participer à l’espace public, mais cette éducation-là est aussi associée à la disparition des cultures et des langues autochtones comme à la désuétude des savoirs traditionnels.
L’éducation représente ainsi un immense paradoxe. Partout dans le monde, les peuples autochtones se sont mis à réfléchir à l’éducation qu’ils
souhaitent pour leurs enfants et à produire des savoirs sur leur propre société. Ils mettent en place des écoles et des centres d’apprentissage à l’intérieur des communautés résidentielles. Ils proposent des approches alternatives à l’éducation nationale et s’appuient sur les langues maternelles, sur les cultures locales. Ils mobilisent des stratégies autonomes de transmission des savoirs et promeuvent leurs systèmes de valeurs. Quel type d’approche produit les meilleurs résultats pour les peuples autochtones?
Owners of Learning : le lien entre éducation et autodétermination chez les chasseurs cueilleurs autochtones, en Afrique australe
Jennifer Hays, UIT, Université arctique de Norvège
Jennifer Hays présentera le livre qu’elle a consacré au Village Schools’ des Nyae Nyae, et récemment publié. En s’appuyant sur près de 20 ans de travail et de recherche en Afrique australe sur l’éducation autochtone, Hays décrit les défis auxquels sont confrontés les Nyae Nyae Ju|’hoansi et leurs « écoles de village » en Namibie. La situation de ces institutions qui
représentent pour les communautés San un effort d’éducation en langue maternelle sera mise en perspective dans le contexte plus large des San en Afrique australe. L’auteure analysera comment, malgré d’énormes défis, la communauté Nyae Nyae continue de faire des choix éducatifs stratégiques fondés sur des options de subsistance réalistes. Elle nous
proposera de réfléchir sur le type d’éducation susceptible de rapprocher les communautés des chasseurs-cueilleurs, comme les Ju|’hoansi et d’autres groupes San, de l’idéal de « l’auto-détermination » dans le monde moderne.
Plus d’informations sur le livre ici
Limites et défis de l’éducation interculturelle bilingue en Amérique latine
Emmanuelle Ricaud (IIAC/LAIOS)
À partir des analyses et réflexions de Luis Enrique López et de Sheila Aikman issues de l’ouvrage « Quelle éducation pour les peuples autochtones ? » et d’un travail de terrain réalisé en Amazonie péruvienne (2010-2016), cette communication présentera les particularités de l’éducation interculturelle bilingue en Amérique latine et les défis qu’elle
suppose en termes d’enjeux politiques et de modalités de mise en oeuvre. Malgré des avancées légales et rhétoriques notoires au regard de l’éducation des peuples autochtones, dans cette région, et la mise en place de dispositifs éducatifs interculturels les États-nations constituent, selon López, un obstacle majeur à l’éducation interculturelle bilingue qui y est
promue, en raison d’une vision hégémonique de l’existence orientée vers le développement économique. Pour y remédier, il suggère une refonte structurelle de l’État-nation latinoaméricain tel qu’il existe aujourd’hui – y compris bolivien et équatorien – et l’adoption d’une nouvelle épistémologie du développement. Par ailleurs, en s’appuyant sur une étude qu’elle a menée auprès des Arakmbut, en Amazonie péruvienne, Sheila Aikman souligne la nécessité de la participation des peuples autochtones à la prise de décision pour ce qui concerne leur éducation – au sens large – face à l’interprétation restrictive et idéologique de l’éducation interculturelle bilingue par les institutions étatiques. Ces travaux nous inspirent des pistes de réflexion quant à l’avenir de l’éducation des peuples autochtones en Amérique du sud.
Éducations autochtones contemporaines
Marie Salaün (Université René Descartes Paris) et Bruno Baronnet (Universidad Veracruzana, Mexique)
Le dossier du numéro 15 des Cahiers de la recherche sur l’éducation et les savoirs intitulé "Éducations autochtones contemporaines" réunit 9 contributions empiriquement situées qui interrogent les déclinaisons locales de la mise en oeuvre des grands principes du droit international dans le champ de l’éducation autochtone (au Canada, en Equateur, au Mexique, en Guyane, à Hawaii, en Nouvelle-Calédonie, au Brésil, au Pérou, en Namibie). Les textes proposent, d’une part, des approches compréhensives et critiques d’un certain nombre d’expériences contemporaines en partant des conditions historiques de l’évolution des
politiques indigénistes menées par les États au siècle passé dans le but de scolariser l’ensemble des enfants autochtones pour les « civiliser » et les assimiler dans des sociétés nationales dans lesquelles ils font encore souvent figure de citoyens de seconde zone. Ils proposent, d’autre part, des éclairages particuliers pour comprendre la complexité des relations entre les peuples autochtones et les communautés nationales dans lesquelles ils ont été enfermés par le processus colonial. À la différence de la plupart des études commanditées par les bailleurs de fonds pour répondre à leur besoin d’une évaluation des performances des systèmes locaux, les travaux présentés dans ce dossier ré-enchâssent les questions scolaires dans des déterminations plus globales, qu’il s’agisse des problèmes structurels qu’affrontent au quotidien les peuples autochtones dans le champ de l’enseignement ou de leur rapport aux différents types de savoirs qu’ils doivent désormais maîtriser.
Anita F. Tzec, post-doctorante à l’Université de Leiden, Pays-Bas
La lutte territoriale des Mayas du sud du Belize
Anita Tzec évoquera l’expérience du processus de lutte territoriale des Mayas de Toledo, au sud du Belize. Elle abordera leur organisation socio-politique, leur système de gouvernance au niveau communautaire et les nouveaux processus liés à la formation d’ONG autochtones. Elle expliquera comment institutions traditionnelles et nouvelles organisations s’articulent pour prendre des décisions et élaborer des stratégies qui ont montré leur efficacité devant les tribunaux du Belize. Les peuples autochtones de ce pays se sont affirmés comme nouvel acteur social et politique dynamique, avec une voix qui ne peut plus se taire ou être retenue, pour la défense de leurs terres, territoires et ressources.
Pour comprendre le processus à partir du niveau micro et la façon dont il a trouvé sa place aux niveaux national et transnational, elle présentera le cas de la communauté q’eqchi’ de Conejo, située dans le sud du pays. Cette communauté a été l’une des premières communautés présentées par le mouvement maya comme une « communauté modèle » et qui a déposé un recours devant la Cour suprême du pays pour demander la reconnaissance de ses droits territoriaux. En 2007, la communauté Conejo a remporté le premier procès contre le gouvernement dans ce pays.
La présentation portera sur la période allant de1980 à 2016, pour mettre en lumière les progrès réalisés depuis le succès juridique de 2007 ainsi que les défis rencontrés et les lacunes à surmonter. En conclusion, elle résumera l’état actuel des négociations menées par le gouvernement du Belize avec les Mayas, sur la mise en œuvre des décisions de justice par les tribunaux, jusqu’à présent non respectées.
Irène BELLIER, Directrice de recherches en anthropologie (CNRS, IIAC/LAIOS)
Veronica GONZALEZ GONZALEZ, sociologue (CONACYT/LAIOS)
Odile HOFFMANN, Directrice de recherches (IRD, LMI-MESO)